Quelques mots sur
Echo of Worlds, le second et dernier tome du cycle du
Pandominion de MR Carey. Je n’aime guère chroniquer les tomes n, tu le sais, lecteur, donc je vais faire bref car tu peux trouver le background et les infos pertinentes au début de ta lecture
en cliquant sur ce lien qui t’amènera vers ma chronique du premier opus.
La guerre à mort entre le Pandominion et les mondes de l’Ansurrection continue ; le roman commence même par un assaut des machines sentientes sur rien moins que quinze mondes militarisés du Pandominion, faisant littéralement, côté humanoïdes, plusieurs milliards de victimes (tout est à cette échelle dans ce cycle).
Nonobstant, chaque camp sent bien que la victoire n’arrivera jamais sans la mise en œuvre d’une arme ultime, d’un
Doomsday Device qui ferait basculer le conflit à l’avantage de celui qui le déploierait
(on est ici dans un moment Manhattan à la puissance mille).
De ce fait, du côté des héros du cycle, c’est la crainte raisonnée d’une destruction mutuelle à échelle d’extinction qui commence à poindre, justifiant de mettre en œuvre une stratégie très risquée qu’on ne peut qualifier autrement que de dernière chance.
Qui sortira vainqueur du conflit ? Une victoire est-elle même possible ou souhaitable ? Comment un groupe hétéroclite de héros de fortune pourrait-il influer sur l’issue d’une conflagration comme il ne s’en produit que rarement à l’échelle du multivers ? C’est à toutes ces questions que répond, de manière très satisfaisante, Echo of Worlds.
Sache, lecteur, qu'on retrouve dans ce second tome les qualités qui faisaient la force du premier.
Le multivers que Carey décrit est toujours aussi foisonnant, source sans cesse renouvelée de merveilles et d’horreurs. Cette création est très réussie, aussi réussie que l'est sa caractérisation des personnalités numériques, tant d’origine humanoïde qu’issues de l’Ansurrection.
Carey traite aussi de manière convaincante le nœud de son problème : les difficultés de communication qui empêchent tout rapprochement entre humanoïdes du Pandominion et machines sentientes de l’Ansurrection, sans oublier les incompréhensions qui affectent même les créatures de même nature.
Pour les personnages, dans ce tome, Carey va encore plus loin, me semble-t-il, dans leur caractérisation comme dans l’évolution de leurs psychologies respectives. Les héros du cycle – déjà fort bien croqués dans le premier volume – sont tous changés en profondeur par leurs interactions mutuelles ainsi que par les événements cataclysmiques qu’ils traversent. Leurs réactions comme leurs développements parallèles sont crédibles, ces sentients gagnent en profondeur et en maturité au fil des pages. Bien.
Concernant le rôle des uns et des autres, si, au cœur de l’action (il y en a, elle est énorme), les deux troopers du premier tome sont toujours capitaux, l’auteur met maintenant au centre de la planification et des actes d’infiltration les personnages qui semblaient jusque là les plus fragiles et les moins adaptés aux opérations de guerre. Ils font ici montre d'autant de courage que d’intelligence et conquièrent la sympathie du lecteur ; le tout sous la direction d’un Rupshe-IA seul à même de gérer une telle complexité.
Concernant Rupshe-IA justement, le dosage de ses pouvoirs m’a semblé bien vu et pertinent ; on n’a jamais, imho, l’impression de voir un deus ex machina, ses interventions rendent justice à ses impressionnantes capacités de calcul sans jamais paraître sorties du chapeau du magicien.
D’autres acteurs apparaissent encore, que je te laisse découvrir, lecteur, et tu prendras sûrement plaisir à apprendre qu’une bien vile personne reçoit sa juste rétribution.
Enfin, Carey ne tombe pas dans le piège, courant, des romans à enjeux énormes qui se résolvent comme des soufflets qui se dégonflent car il n’y avait pas de moyen proportionnel possible face à l'incommensurable menace imaginée par l'auteur. Ici, ce sont des actions cohérentes avec l’enjeu, audacieuses et réussies – y compris en acceptant les sacrifices nécessaires – qui permettent de trouver une solution satisfaisante à une crise globale (pas de spoil, on sait dès le début du tome 1 que la crise est surmontée du fait même de l’existence du narrateur du récit).
J’ai craint à un certain moment un instant Sylfen
(comme dans L’étoile de Pandore), c’est à dire un grand moment de temps perdu à baguenauder hors du sujet principal dans un genre résolument différent de celui du roman, mais même là, même lors de ce moment un peu hors temps, Carey ne dérive pas vers le n’importe quoi et fait quelque chose de capital – logique et cohérent avec le reste – de son chemin de traverse.
Le tout est bien fait, plaisant, dynamique, très agréable à lire. Il y a (un peu) d’humour, c’est très speed, l’action est intense, les personnages aimables, les situations énormes, la fin, originale et qui évite justement l'effet deus ex machina, ouvre des perspectives exaltantes, et, en dépit de l’énormité de toutes les échelles d’intervention, il n’y a jamais de moment où on se dit que décidément, là, c’est un peu too much. Que demander de plus ?
Echo of Worlds est la belle conclusion d’un beau cycle de SF. Fonce, lecteur !
Echo of Worlds, MR Carey
Commentaires
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