Suite et fin de Choc Terminal dans sa version française.
L'effet Pinatubo, recherché par le milliardaire T.R. Schmidt, s'est produit. Le climat change. Globalement pour le mieux, mais qui peut se dire à l'abri d'un effet pervers ? Il suffit d'une toute petite modification sur l'aile d'un papillon pour que certaines zones se retrouvent dans une situation pire encore que la précédente, singulièrement (peut-être, qui peut le dire ?) l'Inde, dans laquelle le régime des moussons est surveillé comme le lait sur le feu. D'autant que, démonstration faite, tous ceux qui le peuvent (et notamment un T.R. Schmidt en roue libre) se mettent à leur propre géoingénierie. Le monde se retrouve donc avec des projets existants ou en gestation en Papouasie Nouvelle-Guinée, en Albanie, en Arabie Saoudite, en Israël, etc.
Au milieu de cette effervescence, les personnages découverts dans le premier tome tentent de contrôler une situation qui devient progressivement de plus en plus chaotique.
Je pense que les quelques lignes qui précèdent suffisent à résumer ce qui se trouve à l’intérieur des 416 pages de ce tome 2. Qu'en est-il de la réalisation ?
Neal Stephenson avait apparemment pour projet de dire au monde :
- que la géoingénierie est un moyen de lutte contre le réchauffement climatique
- qu'elle a des conséquences imprévisibles qui impliquent de ne la manier qu'avec la plus extrême prudence, voire pas du tout
- que, géoingenierie ou pas, les Etats dont les terres sont proches du niveau de la mer vont avoir très chaud aux fesses prochainement
- que succès comme effets pervers sont, au mieux, hypothétiques, les modèles étant d'une complexité hallucinante et aucune expérience à grande échelle n'ayant eu lieu
- que certains milliardaires sont aujourd'hui plus puissants que des Etats (si on considère la puissance comme la capacité objective d'agir à grande échelle)
- que les Etats démocratiques sont lents
- que les multinationales trouvent toujours le moyen de retomber sur leurs pattes
- que les Etats ont toujours la force militaire de leur côté et qu'ils n'hésitent pas à l'utiliser quand leurs intérêts sont en jeu
- que l'étoile des USA a pâli au profit de celles de la Chine ou de l'Inde, sauf dans le domaine militaire
- que des individus bien markétés sont capables de soulever l'enthousiasme des foules dans une société du spectacle qui a réinstauré une guerre spectacle qu'on aurait pu croire tombée en désuétude
- que les deepfakes foutent le boxon et que les Etats n'hésitent pas à les utiliser
- qu'il y a toujours de pauvres idéalistes qui paient le prix du sang
- que le monde est un joyeux bordel de colonies anciennes ou nouvelles et de mélanges ethniques
Que donc l’ensemble de tout ça fait de notre monde un vrai maelstrom qu'il est presque impossible d'embrasser dans sa totalité et que personne ne peut espérer totalement contrôler. Et qu'y bouillonne une forme de chaos pur que l’extension de l'aire humaine et le développement sans fin des possibilités techniques qu'offrent les énormes machines auxquelles l'auteur rend un hommage amoureux rendent chaque jour un peu plus difficile à maîtriser pour ceux qui jouent le Grand Jeu.
Si c'est ce que voulait exprimer Stephenson avec ce roman objectivement trop long et narrativement foutraque, s'il voulait donc le démontrer par l'exemple, c'est réussi.
S'il avait un projet autre, alors c'est plus délicat.
Choc Terminal 2, Neal Stephenson
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