BLOG EN MODE DÉGRADÉ
ON REFERA MIEUX QUAND ON POURRA MIEUX.
JUSQUE LÀ, LECTEUR, POUR ENCORE QUELQUES MOMENTS, IL TE FAUDRA ACCEPTER DE ME FAIRE CONFIANCE SUR JUSTE DEUX OU TROIS LIGNES.
Difficile de dire quelque chose de censé sur le tome 1 de Choc Terminal, le dernier roman de Neal Stephenson. Coupé en deux pour amortir les coûts de traduction, il offre depuis trois jours sa première moitié en VF avant que sa fin n'arrive le 29 mars. Et cette première partie (je n'ai pas encore lu la seconde) est une longue exposition de notre monde dans un futur proche. Pas dénuée d'intérêt ou d'un certain humour, mais néanmoins pas plus qu'une exposition.
Le réchauffement climatique continue de s'aggraver, avec son cortège d'effets collatéraux plus handicapants les uns que les autres pour notre survie en tant que civilisation. Les eaux montent. Les terres basses tremblent. Les combinaisons de protection thermique sont d'usage au Texas. Il est impossible de vivre dans des maisons non climatisées mais les transformations du cycle de vie des fourmis met en péril cet équipement et les humains avec. Les réfugiés thermiques s'entassent dans des camps. Etc.
Et aussi, les pandémies se succèdent – avec les systèmes de surveillance associés –, et on se bat toujours sur le toit du monde entre l'Inde et la Chine.
Face à cette réalité, face plus précisément au risque de montée du niveau des mers, et là où Kim Stanley Robinson proposait une solution politique, collective, parfois violente, et de long terme, Neal Stephenson met en scène, lui, l'action solitaire d'un milliardaire, entre savant fou et visionnaire surdoté, qui lance une opération de géoingénierie à très grande échelle en propulsant des quantités astronomiques de soufre dans l'atmosphère afin de provoquer un effet Pinatubo pour la refroidir et ainsi inverser la montée des eaux. Ceci bien sûr sans avoir demandé d'autorisation à qui que ce soit, et nonobstant une conscience claire des effets pervers que cela pourrait créer dans quelques pays (malgré des conséquences globalement positives pour le monde). Une approche bien plus libertarienne que chez son prédécesseur. Au-delà de l'histoire elle-même, cette approche est perceptible dans les termes du texte, entre ironie sur les Verts et leurs illuminations, remarques sur l'impuissance des Etats et organisations internationales, et regret sur les délais qu'impose le respect des procédures juridiques.
Un récit qui évoque Verne par moments, tant par la quantité de détails d'ingénierie fournis que par la présence d'un riche scientifique comme personnage ambigu, T.R. Schmidt, sans oublier le « canon à soufre » ou la petit coterie d'acteurs qui fleurent De la Terre à la Lune.
Ce n'est pourtant pas Schmidt qui ouvre le récit. C'est une terriblement normale reine des Pays-Bas, Saskia, qui lance l'action en s'écrasant en avion à Waco (à cause d'un effet secondaire de la très forte chaleur devenue banale au Texas où elle doit se rendre). Elle est ici pour rencontrer Schmidt incognito et est donc arrivée en avion privé avec seulement un staff très réduit. Problème : sur la piste d'atterrissage le jet qu'elle pilote heurte une harde de cochons sauvages hybrides et se vautre lamentablement. Mais heureusement Saskia et son équipage sont sauvés des suidés par Rufus, un « comanche » qui gagne sa vie en les chassant. Sans moyen de transport évident et nécessité de discrétion oblige, Saskia et sa troupe vont s'agréger à Rufus et la sienne pour aller au rendez-vous de T.R. Schmidt lors d'une longue traversés du Texas sous réchauffement.
De là, le roman est, je le répète, une présentation par touches : de la réalité concrète du monde sous réchauffement, de la personnalité et des biographies des acteurs du récit (Schmidt, Saskia, Rufus, leurs bandes, sans oublier les représentants de Venise, Londres, ou Singapour), des discrètes manœuvres en coulisse du gouvernement chinois qui voudrait savoir, contrôler, ou empêcher, mais est tenu à l'écart, comme l'est l'Etat US et tous les autres – il est d'ailleurs significatif que soit invitée la reine héréditaire des Pays-Bas et pas son premier ministre élu – , par le milliardaire visionnaire ou mégalomane.
Ce n'est jamais déplaisant mais plus de 300 pages de présentation, c'est quand même un peu long. A la fin du tome 1, les tirs de soufre ont commencé et on s'inquiète, sans excès, du possible « choc » qui serait causé par un arrêt forcé de l'opération (sous l'action des Etats on l'imagine). Seul le tome 2 nous dira s'il valait la peine de commencer à cheminer avec Stephenson.
Choc Terminal t1, Neal Stephenson
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