The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

Un chant de Noël - Munuera d'après Dickens


Long story short.

José-Luis Munuera – assisté de Sedyas aux couleurs – propose une version BD du célébrissime Chant de Noël de Charles Dickens.

Particularité de cette version : Ebenezer Scrooge, le vieil avare atrabilaire et solitaire qui reçoit, une nuit de Noël, la visite des trois esprits des Noël passés, présents et futurs qui lui montrent l'impasse qu'est sa vie jusqu'à l'amener à s'amender et à changer radicalement est ici remplacé par une femme, Lady Elizabeth Scrooge, qui partage les odieux traits de caractère, la dureté et l'insensibilité de son « modèle ».

Confrontée aux même esprits, Lady Scrooge résistera certes un peu plus que le héros de Dickens mais, globalement, elle changera aussi dans le sens d'une plus grande générosité, abandonnant les accents malthusiens qu'elle et Ebenezer partagent.


Si on ne connaît pas du tout cette histoire, on peut la découvrir ici. Pourquoi pas ?

Si on la connaît, on sera gêné par le sous-texte féministe explicite que Munuera ajoute ex nihilo à l'histoire, au point de la dénaturer en mélangeant les thèmes qu'elle aborde et en y ajoutant celui de la place des femmes dans la société du XIXe siècle. Même lancée sur des rails similaires, l'histoire devient autre, c'est donc une piètre adaptation. Il y a des choses, l'insensibilité et l'avarice par exemple, sur lesquelles le féminisme n'a rien à dire. Elles sont même très nombreuses, mais Munuera ne semble pas être au courant.


Enfin, pour conclure sur ce Trouble dans l'adaptation, signalons que Dominique Barbéris, qui préface, écrit qu'ici on change le genre du personnage central et que ça change tout. Sauf qu'elle se plante. Ce qui est changé ici est le sexe 'biologique', le genre est le construct social associé au sexe, le faisceau des attentes sociales et des hiérarchies implicites liées au sexe biologique (voilà pourquoi un parle aussi de rapports sociaux de sexe), ce qui n'a rien à voir. Quand Elizabeth remplace Ebenezer on change de sexe et de rien d'autre, d'autant qu'Elizabeth ne se conforme pas aux attentes de son genre. Quant aux genres masculins et féminins, tels que définis au début du XIXe, ils ne sont pas modifiés par l’inversion de personnage. J'espère que la préfacière s'en souviendra.

Et l'erreur terminologique – qu'on attribuera à l'enthousiasme de l'emploi d'un mot qui enivre – est d’autant plus drôle qu'elle est contredite six lignes plus bas par la même : « Et pourquoi pas? L'égoïsme et la rapacité n'ont pas de genre. Les femmes sont des hommes comme les autres. » Alors à quoi sert l'inversion ? L'auteur, lui, semble penser qu'elle amène un surplus d'âme. Chacun parasite l'autre.


Un chant de Noël, Munuera d'après Dickens

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