La Migration annuelle des nuages - Premee Mohamed

Post-apo intimiste, monde effondré, référence à The Last of Us . Dans La Migration annuelle des nuages suivez les traces d'une jeune femme qui se demande si elle peut quitter sa famille et sa communauté pour répondre à l'appel d'un avenir meilleur. Une lecture très plaisante. Et, oui, c'est bien mieux que The Butcher of the Forest . Je ne peux en dire plus car ma chronique sera dans le Bifrost n° 118, et elle ne reviendra ici qu’un an après la sortie de la revue (c’est à dire, pfff…). Je peux au moins donner le résumé de la couv’ car celui-ci est disponible partout : Une communauté unie est toujours plus forte face aux inévitables effondrements que l’avenir dessine. Celle d’Edmonton, ville en ruines au cœur du Canada, oscille au jour le jour entre rudesse et recherche d’un meilleur confort. Un équilibre que l’apparition du cad, un parasite semi-conscient qui influence le comportement de son hôte, teinte de drame. La vie ne sera plus jamais comme avant, mais ...

Noon du soleil noir - L.L. Kloetzer


L'auteur bicéphale L.L. Kloetzer restera pour toujours le premier lauréat du Prix Planète SF des Blogueurs avec son jamais imité Cleer. C'était il y a onze ans. Quelques romans et nouvelles plus tard, il revient aujourd'hui avec "Noon du soleil noir", un court roman hommage au genre Sword and sorcery.


Ailleurs et hier, dans la Cité des toges noires. La plus grande ville du monde connu est le lieu de tous les possibles. Gouvernée par un Suzerain enfant, administrée par une oligarchie d'eunuques, corrompue du haut en bas et jusqu'à la moelle, carrefour du commerce des biens et lieu d'entrecroisement des hommes, la Cité est singulièrement le rude havre de Yors, un ancien mercenaire fatigué et boiteux qui cherche de faciles missions pour gagner de quoi survivre – on n'appellera pas ça vivre. C'est près du Caravansérail que le vieux baroudeur est engagé par Noon, un jeune homme visiblement aussi riche qu'un peu lunaire récemment arrivé en ville. Noon se dit sorcier, le meilleur des sorciers. Les deux vivront d'étranges et périlleuses aventures entre assassinat et talisman volé sans jamais quitter les murs de la Cité.

Ce quasi « buddy movie » médiéval te seras raconté, lecteur, par le caustique Yors, un narrateur pas toujours fiable que son récent engagement a fait sortir de la misère et qui tente désespérément de comprendre (et de faire rémunérer) un Noon qui ne semble décidément pas de ce monde. L'est-il vraiment d'ailleurs ?


A la lecture de "Noon du soleil noir", on se retrouve plongé dans l'ambiance du Cycle des épées de Fritz Leiber. Le duo d'aventuriers – même s'ils sont différents d'eux – rappelle Fafhrd et le Souricier Gris ; quant au nom complet de la Cité c’était le surnom de Lankhmar, la capitale du dit cycle. On croise même des Mingols, les biens peu aimés nomades des steppes, et des rats fort compétents.

Sword and sorcery. Donc Howard aussi auquel est rendu hommage à travers dieux serpents, antédiluvienne Stygie, Hyperborée. Quelques références aussi à un dieu crapaud rappellent que Leiber connaissait les écrits d'HPL au point d'en avoir écrit un pastiche très réussi.


Le ton aussi fait écho à celui de Leiber. Ironique, parfois gouailleur, il exprime l’émerveillement amusé que l'auteur veut transmettre au lecteur par l’entremise de personnages qui saisissent l'ironie de la vie et subissent les roller coaster des retournements brutaux de fortune. On retrouve aussi dans le ton certains accents du Wastburg de Cédric Ferrand (qui, je crois, a relu), un vieux compère de jdr de Kloetzer - interviewé ici.

Quant à la ville, comme chez Ferrand ou Leiber, elle est croquée avec juste assez de détails signifiants pour en faire un lieu réel. Derrière l'évidence de ses boutiques ou de ses palais, elle est riche de ses enchantements usés, de ses quartiers bigarrés et divers, de rues qui rappelleront des souvenirs aux habitués de Lankhmar – notamment la rue des dieux –, d'un passé qui a laissé sa trace, strate par strate, et qu'il est possible de remettre à jour si on s'en donne la peine comme le fait Noon.


Cette ville et ces personnages, L.L. Kloetzer les décrit et Nicolas Fructus les illustre. Et là, le livre papier offre un niveau supérieur de plaisir. Collant parfaitement aux descriptions du texte, réalisées dans le style beau et précis de Fructus, les nombreuses illustrations, comme les lettrines d'ailleurs, font de ce livre un bel objet dont on prend plaisir à tourner les pages – on les tourne même vite, poussé qu'on est par la volonté double d'avancer dans le récit et de découvrir les illustrations suivantes. C'est une très belle réalisation.


Juste dans son ton, roué et amusant, "Noon du soleil noir" se lit donc vite et avec joie. C'est le texte d'un auteur qui connaît assez bien le S&S pour lui rendre hommage avec distanciation, un texte référencé qui, magie de son allant et de son iconographie, embarque aussi les lecteurs qui n'ont pas les références.

Si on voulait faire une petite critique – qui aime bien châtie bien – on dirait que Yors et Noon sont quand même très sages pour des anti-héros de Sword and sorcery, loin de leurs divers devanciers.

Une nouvelle est à suivre dans le même univers. Je l'attends avec impatience, lecteur, et serai preneur de toute nouvelle incursion dans le monde de la Cité des toges noires.


Noon du soleil noir, L.L. Kloetzer

PS : Et non, aucun Issek de la Cruche...

L'avis de Lorhkand'Apophis et de Feyd Rautha

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