Yal Ayerdhal in Bifrost 118 - La fin de la guerre éternelle

Dans le Bifrost 118 il y a les rubriques habituelles. Critiques des nouveautés, scientifiction and so on. Il y a aussi un édito d'Olivier Girard qui rend un hommage appuyé et émouvant à Yal Ayerdhal , un grand de la SF française qui nous a quitté il y a dix ans et dont je me souviens de le gentillesse et de la capacité d'attention à tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, appartenait à ce milieu qui était le sien et qui est le nôtre. Dans le Bifrost 118 , il y a   donc un gros dossier sur Yal Ayerdhal (qu'on appelait entre nous simplement Yal) . Un dossier sur l'homme actif et en colère qu'il était, de ses combats pour le droit des auteurs à son militantisme intelligent (il y en a) . Dans le  Bifrost 118  il y a aussi une plaisante nouvelle de Yal Ayerdhal,  Scintillements . Il y raconte comment finit la "guerre éternelle" entre deux civilisations galactiques qui n'auront jamais pu communiquer. Dans un écho déformé de Lem ou d'Haldema...

Les Rufians - Santullo - Ginevra


Après Notre part de nuit et Le tango des ombres, voici que je chronique "Les Rufians". Décidément, je ne quitte plus l'Argentine !

"Les Rufians" donc. Un petit album de Rodolfo Santullo et Dante Ginevra, recueil de petites histoires qui semblent indépendantes avant qu'on réalise que les personnages y sont récurrents et qu'il y a une progression chronologique à la chose.


16 juin 1955. Un groupe de militaires factieux décide de renverser le président régulièrement élu Juan Peron – sobrement surnommé Le Général par les Argentins. Le premier acte du coup est un bombardement de la place de Mai – où se trouve la Casa Rosada, le palais présidentiel argentin – à l'occasion d'une cérémonie en hommage à José de San Martín, le héros des indépendances sud-américaines. L'objectif était de tuer Peron dans son palais puis de prendre le pouvoir en investissant un certain nombre de lieux sensibles ; un coup d'Etat parfaitement classique donc.

L'opération, mal préparée et accélérée par crainte de fuites, échoua car Peron, prévenu peu avant les faits de l'existence de mouvements militaires suspects, s'était réfugié à temps dans les locaux du ministère de la guerre. Le bombardement – en deux vagues – et les combats au sol qui suivirent firent néanmoins plus de 300 victimes avant que les mutins consentent à se rendre. Les organisateurs de cette tentative séditieuse, eux, seront pour la plupart réintégrés dans l'armée par le gouvernement issu du coup d'Etat – réussi celui-là – du 16 septembre 1955, seulement trois mois plus tard.

Cette histoire, Santullo et Ginevra la raconte par le petit bout de la lorgnette, du point de vue des sans-grades, des pauvres, des putes, lui donnant, dans une ambiance de milongas, une humanité nouvelle sans plonger dans le pathos des faits historiques eux-mêmes.


C'est donc au ras du sol que nous entraînent les deux gaillards, sur les pas d'une galerie de personnages hauts en couleurs.

  • Ils mettent en scène les familles mafieuses Caraciollo et Renko, lancées dans une lutte à mort.
  • Les gouapes Carucha ou Calzada, impliquées, par hasard et à corps défendant, aux marges du complot qui se trame jusqu'à y jouer un rôle capital.
  • La prostituée amoureuse Paloma, belle et sensible, en voie de rédemption peut-être, le mac Beltran qui la frappe quand elle ne gagne pas assez et ne peut se résoudre à laisser partir sa meilleure « colombe », le pianiste uruguayen Osiris, amoureux et prêt à mourir pour elle.
  • Le caporal Atilio Guzamn, fidèle d'entre les fidèles, qui tente désespérément de prévenir Peron de ce qu'il a compris et se heurte sans cesse aux lenteurs bureaucratiques.
  • Les officiers félons qui sont plus qu'un quarteron.
  • Le salopard veule et corrompu Davinsky qui une fois, mais vraiment une seule, trouvera en lui la volonté de se comporter dignement.


C'est donc ces toutes petites vies mêlées qui s'entrechoquent loin de la politique mais se retrouvent aussi inévitablement affectées par les remous de celle-ci que nous donnent à voir les auteurs dans une succession de petites histoires nerveuses narrées d'un trait rageur sur des fonds ombreux désespérément noirs. Des trognes inoubliables posées sur le noir de la nuit et le noir des secrets, c'est à telle messe que nous convient Santullo et Ginevra. A lire, pour l’émotion autant que pour l'Histoire.


Les Rufians, Santullo, Ginevra

Commentaires

Anonyme a dit…
C’est noté .Merci.Cette période de l’Argentine de Perón et sa galerie de personnages m’interesse.
Gromovar a dit…
You're welcome.