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Gromovar
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Juste quelques mots (et là c'est vrai) sur le tome 2 VO de The Department of Truth. Background et personnages de cet excellente série sont au bout de ce clic.
Cole Turne continue son exploration des arcanes du complotisme américain. Après les délires des pizzagate et autres origines kénianes d'Obama ainsi que l'obscène tentative de nier les tueries scolaires de masse qui peuplaient le premier volume, ce sont ici les cryptides qui tiennent le devant de la scène, l'occasion pour Tynion et sa bande de raconter longuement les vies gâchées de deux chasseurs de Bigfoot et de démonter les mécanismes de la croyance frénétique.
Car on l'a bien compris, une croyance suffisamment forte et partagée en une « vérité » quelconque suffit à provoquer à terme son incarnation (plus ou moins stable) dans le monde réel, elle peut littéralement faire naître des Tulpas (vivants comme les cryptides ou inanimés comme le mur au bout du monde du début du volume 1).
Le Department of Truth abrite donc une unité dont la mission principale est de tuer ces incarnations lorsque sont vivantes et de les annihiler lorsqu'elles sont inanimées, voire, si nécessaire, d'éliminer ceux qui les propagent, pour éviter que d'éventuelles preuves matérielles glanées par ceux-ci n'augmentent encore la croyance en leur existence et par là même leur assise dans la réalité.
Pour cette initiation, Cole est chaperonné par le rugueux Hawk Harrison qui lui explique que son job consiste à « faire de la magie », c’est à dire à façonner la réalité par des bombardements ciblés de contre-informations dont la finalité est de faire disparaître les vérités alternatives en les noyant sous d'autres narratifs. Autrement dit à utiliser mieux et plus vite que les ennemis les archétypes jungiens qui servent de grammaire aux croyances humaines.
Afin de reconstituer le réel ? Ou pas ?
Un doute saisit tant Cole que le lecteur. Car si la réalité est malléable, qui détermine alors qu'elle en est la bonne version ? Quel rôle joue le Département dans cette définition du réel ? Le préserve-t-il ? Le restaure-t-il ? Ou le façonne-t-il à sa guise ?
D'autant qu'on comprend vite – avant le héros lui-même – que le secret d'enfance de Cole n’est que le résultat d'une manipulation et qu'il a fait au moins une victime collatérale. Puis qu'on finit par découvrir que le ver est peut-être dans le fruit même du Département.
"The City upon a Hill" est un deuxième volume tout aussi réussi que le premier. Invoquant Crowley et Blavatsky mais surtout les mânes de Reagan et de sa Cité sur la colline, il invite à réfléchir sur la politique de la conviction comme outil de transformation. Rêver de Bigfoots arpentant les forêts ou rêver d'une Amérique au sommet de sa gloire destinée à lutter contre un empire du Mal quel qu'il soit, c'est au final deux illusions, différentes certes, mais dont l'impact sur la réalité tangible est le même pour peu que leurs forces de conviction soient équivalentes.
Alors le Département protège-t-il le monde du chaos ou assure-t-il une vision impériale de l'Amérique ? Il faudra attendre le troisième volume pour en savoir plus.
The Department of Truth, t2, The City upon a Hill, Tynion, Simmonds, Bidikar
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