The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

Project Hail Mary - Andy Weir


"Project Hail Mary" s'ouvre sur un réveil douloureux. Un homme – le narrateur – sort du coma dans un lieu qu'il ne reconnaît pas, entouré de machines de soins qu'il ne reconnaît pas non plus. Près de lui deux cadavres, installés dans des machines identiques, victimes peut-être d'un dysfonctionnement. Qui sont-ils ? Il l'ignore. Problème, il n'ignore pas que ça. Il ne sait pas non plus qui il est lui-même, ce qu'il fait là, où il est précisément, et pourquoi ?

Ce que toi tu sais, lecteur, car tu as au moins lu la 4ème de couv. avant d'acheter "Project Hail Mary", c'est que la narrateur est seul dans un vaisseau spatial à une douzaine d'années-lumière de la Terre, non loin de Tau Ceti. Et que sa mission, dont il a tout oublié, est cruciale. Rien moins que sauver l'humanité.


Sans spoiler, car on l'apprend vite, l'homme amnésique retrouve son identité. Il s'appelle Ryland Grace, a failli révolutionner l'exobiologie en affirmant dans un article retentissant que la vie n'avait pas besoin d'eau pour se développer, a quitté le monde académique devant le tollé suscité, et, revenu à l'anonymat, enseignait les sciences dans un collège. Il est un homme de notre époque, un de ceux qui font tourner la boutique sans qu'on les remarque.


C'est pourtant vers lui que s'est tournée Eva Stratt, une femme de l'ombre devenue la personne la plus puissante du monde par la grâce d'un accord entre membres de l'ONU, pour l’assister dans la plus grande entreprise que la Terre ait jamais connue.

Car l'heure est grave. Une astronome nommée Irina Petrova a découvert par hasard une émission infrarouge incompréhensible reliant le Soleil à Vénus. Peu après, une sonde solaire japonaise a prouvé que la luminosité solaire diminuait au rythme de l'augmentation de celle de la « ligne Petrova ». Les émissions solaires s'amenuisent, à une vitesse suffisante pour plonger à court terme le monde dans une glaciation fatale. Ce qui avait commencé comme une curiosité scientifique s'est vite avéré être un péril mortel pour toute l'espèce humaine.


Branle-bas de combat. Nomination d'Eva Stratt, à qui sont donnés les pleins pouvoirs sur toutes les ressources mondiales. Et intégration précoce de Grace à l'équipe, en raison de l'hypothèse qui lui avait fait quitter le monde de la recherche. Car la cause du trouble est biologique. Et que les organismes qui le causent – dont on étudient en accéléré les bizarreries métaboliques – offrent involontairement un espoir de solution. Pour l'atteindre, il faudra toutes les ressources matérielles et technologiques du monde, beaucoup de courage, une bonne dose de chance, sans oublier la volonté irrationnelle de ceux qui n'ont plus rien à perdre. L'humanité en est là. Et par ricochet Ryland Grace aussi.


Tout ceci ne te dit pas, lecteur, comment l'homme se retrouve à proximité de Tau Ceti, ni ce qu'il est censé y faire. Pour le savoir, tu devras lire le roman et tu y découvriras, dans une alternance de flashbacks et de scènes au présent, comment l'humanité (la nôtre, celle d'aujourd'hui) est parvenue à monter une telle mission et ce qu'elle en espère.


Dans "Project Hail Mary", Andy Weir crée un personnage très attachant en la personne de Ryland Grace. Tant ses forces réelles que ses nombreuses faiblesses en font un être complexe, un personnage fondamentalement aimable, un véritable héros dont on se surprend vite à souhaiter plus que tout l'improbable réussite.

Seul au milieu de rien, Grace, qui retrouve peu à peu la mémoire et le sens de sa mission, se comporte comme le faisait le Mark Watney de Seul sur Mars, en scientifique pur qui cherche et trouve dans la méthode scientifique les solutions aux problèmes immenses auxquels il est confronté ; et si sur Mars l'objectif était clair, « repartir vivant », ici c'est au bien plus vague « trouver une solution pour sauver la Terre » que s'attaque le narrateur.

Confrontation à l'inconnu, questions d'ingénierie, chaque problème – et ils sont nombreux – est résolu après une analyse rigoureuse suivie d'une réflexion sur les moyens scientifiques et techniques de les surmonter. C'est vrai au présent, alors qu'il est seul dans son vaisseau, c'était vrai sur Terre aussi lorsqu'il fallut, pièce par pièce, créer les conditions de possibilité de la mission et tenter de gagner un peu de temps avant le cataclysme. C'est de nouveau un roman pour technogeek que propose Weir. Et c'est bon, a fortiori dans notre triste monde qui se détourne peu à peu de la rationalité scientifique.


Porté par la personnalité de son héros, "Project Hail Mary" est aussi un roman souvent drôle, traversé d'une forme d'humour pince-sans-rire qu'on trouvait déjà dans Seul sur Mars et qui désamorce la tension et l'horreur pure d'être le seul humain à douze années lumière à la ronde, sans possibilité d'être aidé ou secouru, sans moyen de communiquer avec son point de départ, sans pièces de rechange possible pour ce qui est une tentative one-shot dont la réussite conditionne rien moins que la survie de la plus grande partie de l’humanité. Mark Watney communiquait avec la Terre, Ryland Grace n'a même pas ce luxe. Sans un peu d'humour, impossible de résister au désespoir qui guette.


La mayonnaise prend et elle est bonne. Rapide, rythmé, rempli de rebondissements nombreux, surprenants, parfois terrifiants, "Project Hail Mary", en véritable douche écossaise, met les nerfs du lecteur à rude épreuve en jouant sur une issue favorable qui semble lentement se rapprocher et que quantité d'événements imprévus se plaisent sans cesse à éloigner comme à dessein – ceci jusqu'à la presque toute fin. Et ensuite, quelle fin brillante !


GROS SPOILER DESSOUS – TEXTE EN BLANC – SELECTIONNER SEULEMENT SI VOUS VOULEZ SAVOIR


Mais l'essentiel de la qualité du roman vient de la rencontre que fait Grace avec un alien, seul survivant d'une mission lancée de 40 Eridani dans le même but que le Hail Mary.

Très différents sur le plan de la physiologie comme des sens dominants, incapables de survivre dans la même atmosphère, Grace et « Rocky » développent une confiance mutuelle, apprennent chacun le langage de l'autre, mutualisent leurs connaissances scientifiques et leurs compétences respectives pour réussir ensemble là où seuls ils auraient échoué. 

Entre les deux naufragés, véritables Atlas portant le destin de leurs mondes respectifs sur leurs épaules, se noue peu à peu un lien de camaraderie puis d'amitié véritable, avec la grandeur d'âme et le sens du sacrifice que ça suppose. Deux êtres bons prêtes à tout pour sauver leur monde et s'entraider l'un l'autre.

"Project Hail Mary" est donc un buddy novel qui fonctionne à merveille en dépit de son caractère improbable et dans lequel s'exprime le meilleur de ce que peut faire un humain, le meilleur de ce que peut faire un alien, le meilleur de ce qu'ils peuvent faire ensemble. S'il doit vraiment exister du solar punk, c'est à ça qu'il devrait ressembler.


Il y a 7 ans, je chroniquai Seul sur Mars, le premier roman d'Andy Weir. Relisant la chronique de l'époque, je suis surpris de voir à quel point "Project Hail Mary" est un Seul sur Mars qui, atteignant l'âge adulte, aurait conservé ses qualités en se débarrassant de ses défauts. Un meilleur roman donc. Un roman qui se lit à toute vitesse tant on est captivé par ses protagonistes et ses rebondissements. Ca a été un vrai plaisir de lecture.

PS : Brandon Sanderson a adoré. Il en parle sur son site. Et même Obama le conseille.


Project Hail Mary, Andy Weir

L'avis de Feyd Rautha

Cette lecture participe au Summer Star Wars the Mandalorian.

Commentaires

Le Maki a dit…
Vendu ! Il semblerait qu'il soit publié chez Bragelonne en octobre prochain.