Eric LaRocca - As-tu mérité tes yeux ?

Agnes Petrella est une jeune américaine un peu dans la dèche. Elle est lesbienne aussi, ce qui ne change pas grand chose à l'histoire au début alors que « dans la dèche » en est le point de départ. En ce 26 mai 2000, Agnes, qui a besoin de 250$ pour payer son loyer du mois, poste sur un forum queer une annonce pour mettre en vente un épluche-pomme vieux de plus d'un siècle. Contrairement à ce qui se pratique habituellement, elle a composé pour ce faire un message de presque quatre pages dans lequel elle explique avec force détails à quel point cet épluche-pomme est un élément important de son histoire familiale et donc à quel point aussi il lui est pénible de s'en séparer. Nécessité faisant loi elle s'y est finalement décidée mais, dit-elle, elle ne consentira à vendre l'objet qu'à un collectionneur sérieux (!). Deux jours plus tard, après quelques réponses insultantes, Agnes en reçoit une intéressante d'une certaine Zoe Cross qui dit être intéressée et prêt...

Le Cimetière - Gerard Guix - Retour de Bifrost 97

 


Futur indéterminé. Espagne, peut-être. Montée des eaux, surpopulation, et retombées nucléaires (!) ont rendu les terres (arables sans doute) rares. Si rares qu'il est devenu interdit d'enterrer les défunts et que tous les cimetières ont été récupérés – à l'exception d'un cimetière-musée par district, conservé à titre historique. Mais quand la mère d'Isobel meurt, la jeune femme ne peut se résoudre à la condamner post-mortem à l'incinération et à l'intégration mémorielle dans l'un de ces cimetières virtuels que fournit l'Etat. Alors, sur les conseils d'un médecin ami, elle se rend dans un cimetière-musée rural pour tenter d'y inhumer sa mère. Clandestinement. Car la loi est claire, dure, et durement appliquée. Il faut dire que la société dans laquelle vit Isobel est une dictature, pas moins. Gestion autoritaire des morts, écrans d'informations omniprésents, culture sous le rideau, mise au ban des livres papiers, « vaporisation » des contrevenants. Il y eut même une Grande Purge. Et aujourd'hui il y a un XVIIIe Führer et une loi Lebensraum. Diantre !

Perpétuant par son acte une tradition familiale de résistance à l'oppression, Isobel se met en grand danger. Travis, le gardien du cimetière dans lequel elle prévoit d'inhumer sa mère, l'aidera-t-elle ou la dénoncera-t-elle ? Et surtout, que feront ces deux solitaires de la tension érotique qui naît entre eux dès le premier regard ?


Lisant cette dernière phrase, on a le cœur du problème de ce court roman catalan. Mix peu subtil de Farenheit 451, des Androïdes rêvent-ils de moutons électriques, et de 1984 mâtiné de surpopulation à la Soleil Vert, "Le Cimetière", stylistiquement assez imparfait – dans les dialogues notamment –, échoue à créer l'angoisse lorsqu'il tente de le faire et offre une présentation caricaturale du cinéma d'horreur indigne d'un auteur qui, ici, se réclame de l'Imaginaire ; le tout sans compter un twist qu'on voit venir de l'autre bout du livre. Mais surtout, surtout, "Le Cimetière" place le lecteur dans la situation d'un otage involontaire de roman Harlequin. Une litanie de phrases finalement hilarantes – mais était-ce le but ? – racontent les émois d'Isobel et la folie des sens qui s'empare des deux seuls protagonistes vivants du récit ; c'est si mièvre que j'ai dû aller vérifier l'âge de l'auteur. Impossible de retenir autre chose de ce texte, d'autant que les banalités résistantialistes qui y sont enfinlées comme des perles sur un collier ne sont guère transcendantes ; si les Catalans n'ont que cette bouillie indigente à se mettre sous la dent, craignons pour eux qu'ils ne succombent au crétinisme avant d'atteindre l'indépendance.


Le Cimetière, Gerard Guix

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