The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

The Comet - W.E.B. Du Bois


1920. la queue d'une comète (!!!) traverse New-York, libérant des gaz toxiques qui en tuent toute la population à l'exception notable de Jim et Julia.

Précisons qui sont les deux protagonistes presque uniques du récit. Jim est un employé de banque et il est noir (ce qui en 1920 aux USA n'est pas anodin). Envoyé récupéré des documents dans le sous-sol de la banque, il s'y trouve enfermé quelque temps par accident. Une claustration qui lui sauve la vie car lorsqu'il revient à la surface tout le monde est mort. Errant dans la ville comme le héros du légendaire Question du temps, Jim ne croise que mort et désolation jusqu'à ce qu'il rencontre Julia. Elle partage avec lui le fait d'avoir survécu. Mais rien d'autre. Julia est riche et blanche alors que Jim est pauvre et noir.

Après des recherches infructueuses d'aide ou de survivants, Jim et Julia se disent qu'ils sont peut-être les deux derniers humains vivants et, dans une exaltation toute chrétienne, qu'il leur revient de repeupler la Terre en passant pour la première fois par dessus leurs différences. Julia commence une phrase que Jim termine : « The rich and the poor meet together; the LORD is the Maker of them all. ». Cette citation tirée des Proverbes signifie que les humains sont tous frères, qu'ils ont tous la même origine, qu'ils sont tous autant aimés par leur créateur, et que si celui-ci les voit tous comme ses enfants ils sont donc nécessairement égaux.

Après qu'ils se soient vus vraiment comme humains par delà leurs différences et alors qu'ils s'apprêtent à remplir leur mission divine, voilà qu'arrivent le père et le fiancé de Julia, en compagnie d'autres hommes.
New-York avait péri mais la Terre avait survécu : il n'y avait donc rien à repeupler et l'édifice social existait toujours.
Dans la chaleur de l'instant, on parle de lyncher ce noir trop proche d'une femme blanche et c'est au témoignage de Julia que Jim doit sa sécurité. Mais le monde existe à nouveau, NY n'est pas un second jardin d'Eden, et Julia repart donc avec les siens – non sans que son père rémunère Jim, humiliation suprême. Quant à Jim, il retrouve tout à la fin sa girlfriend, noire comme lui.
Chacun rentre chez soi, et les vaches sont bien gardées.

Deux choses sont fascinantes dans cette courte nouvelle qui ne brille pas par sa narration ou ses rebondissements.

D'une part, l'auteur W.E.B. Du Bois est une star afro-américaine de la sociologie – entre autres nombreuses activités. Il a énormément travaillé sur les afro-américains, et a produit au début du XXe siècle la littérature savante sur le sujet avec ses Souls of the Black Folk et le très impressionnant méthodologiquement The Philadelphia Negro, qui vient d'être traduit à la Découverte 'Les Noirs de Philadelphie' et dont je ne peux que recommander la lecture. Il livre ici un texte de SF, loin de l'excellente non-fiction qu'on lit de lui habituellement.

D'autre part, il est fascinant d'entrer sans fard dans le double espoir de Du Bois, celui d'un monde où la couleur de la peau ne fonderait plus les inégalités et celui d'une « renaissance » (en comicland on dirait un reboot) de l'histoire mondiale qui prendrait en compte, cette fois, l'apport, et déjà simplement l'existence, de l'homme noir.
Et il est aussi fascinant que déprimant de constater que, pour Du Bois, seul un événement cataclysmique serait à même de remettre les pendules à l'heure, ce que la milieu de la nouvelle exprime comme potentialité et que la fin démontre par l’absurde.

The Comet, W.E.B. Du Bois

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