The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

Sefira and other Betrayals - John Langan


"Sefira and other Betrayals" est un recueil de John Langan. Une novella (éponyme) puis sept nouvelles.

C'est une collection de mensonges, de secrets, et de trahisons, que Langan offre ici au lecteur. D'un point de départ qui n'est pas toujours mystérieux en soi, l'auteur entraîne le lecteur sur un chemin fait de background en flashbacks et de révélations discursives, éclairant ainsi peu à peu les tenants et aboutissants de ce qui se joue.
Chaque histoire est comme un oignon dont, au fil des pages, on retirerait pelure après pelure les éléments qui obscurcissent la généalogie de la situation initiale ainsi que la compréhension des vrais enjeux de ce qui est en train de se dérouler.

Il y est souvent (pas toujours) question de famille ou de couple, car où se nichent mieux l'amour et les intérêts liés qui peuvent donner lieu aux mensonges, aux trahisons, et au désespoir rageur qu'ils engendrent. C'est donc souvent cruel, souvent intense, souvent ambigu – un personnage le dit « le contraire de l'amour n'est pas la haine mais l'indifférence » ; tout le recueil est dans cette phrase.

Bien sûr, comme nous sommes sur ce blog, le fantastique n'est jamais absent, parfois minimal, d'autre fois très spectaculaire. Il est parfois, mais pas toujours, cet éléphant dans la pièce qu'on subodorait sans vouloir vraiment s'assurer de la présence.

En terme de construction, Langan sait amener lentement une révélation après l'autre, construisant patiemment ses personnages et son histoire. Sa gestion du rythme est très réussie et rend la lecture passionnante.
En revanche, la moitié des textes environ aboutissent sur une fin qui n'est pas totalement satisfaisante, soit qu'on la sentait venir, soit qu'elle est anti-climatique, soit qu'elle est bien trop longue et dans un ton différent de tout ce qui précédait (cf. Sefira).

Sefira est une superbe histoire d'amour et de sexe trahis, un road trip tant interne qu'externe à la recherche d'une vengeance et d’une rédemption. Un très beau texte qui, à mon sens, vire vers la fin dans une direction moins originale et sans doute trop longue.

In Paris, in the Mouth of Kronos propose un récit de vengeance  post-guerre très inquiétant, avec deux personnages qui évoquent un peu les Vincent et Jules de Pulp Fiction. Leur destin sera bien sombre, mais son advenue trop abrupte imho.

The Third always beside you est une bien belle histoire de secret de famille, dont la fin est trop prévisible.

The Unbearable Proximity of Mr. Dunn’s Balloons est un texte weird sur la mort, la vie après la mort, une forme particulière de « spiritisme ». Surprenant.

Bloom apprend au lecteur qu'il est parfois peu judicieux de vouloir rendre service, surtout quand on trouve une glacière médicale abandonnée. Une horreur tant psychologique qu'organique.

Renfrew's Curse – ma préférée, avec les 3 premiers quarts de Sefira – est une très surprenante histoire de randonnée dans la lande écossaise. Un lieu où on fait de bien sinistres rencontres. Et un twist de construction qui est presque magique. Je n'en dis pas plus.

Bor Urus dit l'histoire d'une famille qui en a trop vu lors d'une tempête, une tempête qui, à long terme, ne détruira pas que des bâtiments.

At Home in the House of the Devil est une tragédie de couple, d'erreurs qu'on fait par amour, de responsabilités non prises.

Ce sont huit vrais plaisirs de lecture dont trois laissent un léger goût de déception à la fin, au moment où le soufflé semble retomber trop vite. Mais, imho, l'ensemble vaut quand même la peine d'être lu, car Langan mélange les genres, construit de belle manière ses récits, donne chair et souffle à ses personnages. C'est déjà beaucoup.

Sefira and other Betrayals, John Langan

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