The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

The Gurkha and the Lord of Tuesday - Saad Z. Hossain


Himalaya, futur indéfini.
Melek Ahmar, Lord of Mars, Red King, Lord of Tuesday, Most August Rajah of Djinn, se réveille et se libère du sarcophage runique qui le tenait emprisonné depuis des millénaires. Temps et érosion ont fait leur oeuvre ; rien n'est éternel, si ce n'est Melek Ahmar et les siens. Encore faible, désireux de retourner vers un monde à reconquérir, Melek rencontre, dans la montagne, Bhan Gurung, un solitaire qui vit en ermite et fut soldat dans une première vie. Ensemble ils prennent la direction de Katmandou, dans un monde qui ne ressemble plus du tout à celui qu'arpenta Melek.

Pollution et nanites ont ravagé la Terre et décimé l'humanité. A la surface du globe quelques villes subsistent, dont Katmandou. Gouvernée depuis 20 ans par Karma, une IA surpuissante mais non sentiente, la ville est devenue une sorte de paradis post-politique dans lequel l’administration des choses à succédé au gouvernement des hommes. Grâce aux nanotechs et aux capacités de calcul incommensurables de Karma, la ville fournit à tous la « base » : nourriture, boisson, logement, vêtements. Pour le superflu, il faut se rendre utile de quelques manière que ce soit à la communauté, chaque crédit obtenu de la sorte étant ensuite échangeable sur un marché des crédits qui obéit strictement aux lois de l'offre et de la demande. Ceux qui ne produisent rien sont des « zéros », nommés ainsi en raison de montant de leur crédit ; ils vivent de la « base », sans plus.

Dans le paradis post-travail qu'est Katmandou, Karma est une déesse tutélaire bienveillante. Elle ne juge pas et n'a pas d’opinion. Elle fournit à tous le minimum puis évalue et applique le prix des choses en pur commissaire-priseur walrasien. Sa seule fonction est de maximiser à chaque instant l'utilité globale de la société.

Si ce monde peut évoquer en partie celui du Dans la dèche au royaume enchanté de Cory Doctorow, il faut néanmoins y ajouter quelques éléments.
D'abord, chaque citoyen est doté de deux systèmes implantés dans le corps. D'une part un Echo qui permet, grosso modo, de se connecter à la Virtualité. D'autre part un PMD qui assure une santé optimale à son porteur en traitant en temps réel les agressions.
Le PMD a une autre fonction. Libérant des nanites autour de son porteur, il purge l'air de tous ses composés toxiques naturels ou artificiels. Insuffisant seul pour créer une zone saine, il permet d’atteindre en synergie, si suffisamment de citoyens vivent dans un espace donné, le tipping point au-delà duquel un espace sain est généré dans lequel vivre sans craindre pollution ni nanites. D'où les regroupements en villes ou grandes communautés – qui ne doivent néanmoins pas devenir trop grandes, l'homéostasie est subtile.
Ensuite, la ville est sous contrôle permanent de Karma, qui est omnisciente en plus d'être quasi omnipotente.

A Katmandou, c'est le bonheur, on est en sécurité, on mange à sa faim, on reçoit en fonction de ses mérites. A l'extérieur c'est autre chose ; mais qu'importe quand on a la chance de vivre à Katmandou.
L'arrivée des deux non implantés dans la ville va ouvrir une ère de désordre et mettre à jour d'ignobles secrets. Car Melek veut régner – ou à défaut détruire –, car Gurung a une vengeance à accomplir ; et que Karma ne peut tolérer ni l'un ni l'autre de ces projets.

Avec "The Gurkha and the Lord of Tuesday", Saad Z. Hossain signe une novella exaltante dans le ton un peu fou de son Escape from Baghdad.

Mêlant SF environnementale, SF post-travail, fantasy, et enquête policière, dans une histoire rythmée et souvent drôle, il réussit à dire une histoire captivante – picaresque même – tout en pointant les travers de l'humanité et les non-dits des réflexions survivalistes.

Il y réussit grâce à des personnages bien campés. Melek, qui a connu Homère, Horus, et j'en passe, est un djinn versatile, anachronique, querelleur, imbu de lui-même, aussi imprévisible que la foudre. Gurung est le taciturne dont on voit bien que la vie entière est tirée par un irrépressible désir et qu'il ne reculera devant rien pour le réaliser. A ces deux figures s'ajoutent celles de Hamilcar Pande, un « enquêteur » obstiné et intègre, tenace comme un Colombo local, du colonel Shakia, combattante courageuse et indépendante, du richissime et incroyablement cynique Doje, ainsi que d'une jeune djinn irrespectueuse. Sans oublier Karma bien sûr, qui jongle entre les probabilités.

Il y réussit aussi grâce à une histoire, pleine de bruit et de fureur, mais aussi d’humour et de sens, qui ne révèle que lentement ses tenants et aboutissants, au fil d'une enquête qui mettra à jour une indicible vérité.

"The Gurkha and the Lord of Tuesday" est une novella enlevée, amusante, terrifiante par moments. Un vrai bon moment de lecture de la part d'un auteur qui sait ce que divertir intelligemment veut dire.

The Gurkha and the Lord of Tuesday, Saad Z. Hossain

Commentaires

Alias a dit…
Ouh, mais ça a l'air très chouette, tout ça!

C'est du Tor Books, c'est ça?