L'Ombre sur Innsmouth - Lovecraft illustré par Baranger

Comme deux fois déjà , je signale la sortie d'une adaptation de Lovecraft par François Baranger. Il s'agit cette fois de The Shadow over Innsmouth , ici traduit littéralement L'Ombre sur Innsmouth au lieu du plus traditionnel Le Cauchemar d'Innsmouth . Comme pour les deux adaptations précédentes, je ne vais pas chroniquer un texte connu et maintes fois résumé, analysé, décortiqué. Je te renvoie donc pour l'histoire, lecteur, à la fiche Wikipedia de la nouvelle, fort bien faite si ce n'est qu'à l'instant où j'écris ces mots la version de Baranger ne s'y trouve pas encore. Tu prendras plaisir, j'en suis sûr, à lire la belle préface de Sandy Petersen, notre maitre à tous, à parcourir les rues de la très décatie Innsmouth dans les pas de Robert Olmstead, à pénétrer dans la délabrée Pension Gilman, à contempler la façade du bâtiment abritant L'Ordre ésotérique de Dagon , à côtoyer des Marsh, trop de Marsh. Le "masque d'Innsmouth...

Wartburg 1210 - Jean d'Aillon


"Wartburg 1210", Jean d'Aillon revient une nouvelle fois au Moyen-Âge de Philippe-Auguste.

Après l'ignoble massacre de Béziers, Guilhem d'Ussel décide de quitter une terre d'Occitanie dont il prévoit qu'elle fera face à des décennies de troubles et d'exactions. Car, même lorsque seigneurs et chevaliers croisés – fortune faite – seront rentrés chez eux, resteront sur le terrain des hordes de soldats sans solde et d'estropiats divers qui pilleront, violeront, navreront, autant par nécessité que par ce plaisir pervers qu'on éprouve à voir qu'une situation inédite rend possible ce qui ne l'était pas jusque là.

Il lui faut donc partir, emmener ses gens loin du péril. C'est vers Rouen – où l'attend sa bien aimée Rebecca – que le chevalier troubadour dirige ses pas et ceux de la petite caravane qu'il conduit. Il espère se reposer enfin loin de la fureur des batailles et vivre paisiblement avec sa mie. Il espère aussi rendre visite ensuite à son ami Wolfram d'Eschenbach et y reprendre, en sa compagnie, une vie de ménestrel dans la Germanie lointaine.

Hélas, l’expédition se révèle plus périlleuse que prévue. En chemin, Guilhem s'approche trop près d'un repaire de malandrins, puis croise la route d'un vieil ennemi auquel il avait ravi l'otage Richard Cœur de Lion et qui, depuis, rêve de prendre une revanche définitive.
Enfin, un malheur n'arrivant jamais seul, une terrible nouvelle attend Ussel à Rouen.

Laissant Rouen derrière lui, Guilhem part donc plus tôt que prévu, et avec seulement quelques compagnons, pour la Germanie et le Château de la Wartburg.

Parti rejoindre un vieil ami, il servira encore une fois les intérêts du Roi de France dans la lutte qui l'oppose à Otton IV, le nouveau maître du Saint Empire, et à son allié funeste allié Jean sans Terre.
Il tombera aussi au cœur d'un nid de frelon, en plein milieu de la lutte qui oppose Hermann Ier de Thuringe à l'Empereur.
Cerise sur le gâteau, il mettra un terme aux agissements criminels d'une sorcière dévorée d'ambition et détruira le sabbat auquel elle participe activement, sauvant par là-même la belle et innocente Blancheflor.

Avec "Wartburg 1210", Jean d'Aillon envoie Guilhem et ses proches dans la froideur neigeuse de la Thuringe médiévale, dans la riche Harz truffée de mines d'argent.

Il introduit le lecteur aux arcanes d'un Saint Empire à la hiérarchie sociale très stricte et aux manigances politiques incessantes, l'Empereur étant élu par une théorie de princes et d’évêques ce qui crée la possibilité de jeux d'alliance et d’influence incessants, sans oublier l'utilisation, pertinente en l'espèce, de l’assassinat politique.

On y voit un Guilhem détourné de Dieu, fatigué par les malheurs qui se sont abattus sur lui toute sa vie durant. Un Guilhem moins invulnérable, capable d'erreurs et de défaites tactiques, jusqu'à se trouver devoir sa vie à de bien étranges mineurs. Un Guilhem en quête d'une paix qu'il a bien du mal à trouver.

On y voit ses proches s'établir, souvent avec son aide, dans ces vies sédentaires et confortables qui semblent lui être toujours refusées.

On y voit enfin l'auteur s'amuser à réécrire la légende médiévale de Blancheflor et de sa marâtre, popularisée par les frères Grimm dans l'histoire de Blanche-Neige, inspirée elle-même par le conte Richilde de Musäus.

Après un début sans doute trop lent, le roman gagne un momentum important. Captivant l’attention, il se révèle alors d'une lecture agréable et ramène son lecteur dans un Moyen-Âge dur comme de l'acier, dans une société d'ordres où la vie humaine ne vaut guère et où la justice n'est souvent qu'un mot creux. Les aspirations profondes de Guilhem ne peuvent vraisemblablement pas y trouver un cadre à leur mesure ; lorsqu'on sait qu'à la fin il se dirige – sans encore le savoir – vers Bouvines et sa bataille, tout semble indiquer que ses tribulations sont loin d'être terminées.

Wartburg 1210, Jean d'Aillon

Commentaires