Eric LaRocca - As-tu mérité tes yeux ?

Agnes Petrella est une jeune américaine un peu dans la dèche. Elle est lesbienne aussi, ce qui ne change pas grand chose à l'histoire au début alors que « dans la dèche » en est le point de départ. En ce 26 mai 2000, Agnes, qui a besoin de 250$ pour payer son loyer du mois, poste sur un forum queer une annonce pour mettre en vente un épluche-pomme vieux de plus d'un siècle. Contrairement à ce qui se pratique habituellement, elle a composé pour ce faire un message de presque quatre pages dans lequel elle explique avec force détails à quel point cet épluche-pomme est un élément important de son histoire familiale et donc à quel point aussi il lui est pénible de s'en séparer. Nécessité faisant loi elle s'y est finalement décidée mais, dit-elle, elle ne consentira à vendre l'objet qu'à un collectionneur sérieux (!). Deux jours plus tard, après quelques réponses insultantes, Agnes en reçoit une intéressante d'une certaine Zoe Cross qui dit être intéressée et prêt...

La solution à sept pour cent - Nicholas Meyer


"La solution à sept pour cent" est un amusant pastiche de Sherlock Holmes, écrit par Nicholas Meyer.

Enfin, pour être exact, le texte auquel accède le lecteur est la mise en forme lisible d'un témoignage retrouvé par hasard dans un grenier. Un texte dicté, en 1939, par un docteur Watson vieillissant à une sténo/dactylo qui proposait ses services d’écriture aux résidents de la maison de retraite dans laquelle il finissait paisiblement ses jours. Une confession qui, depuis, dormait, inconnue de tous. Un témoignage qu'après de longues années la chance et Nicholas Meyer auront rendu accessible au grand public.

Et quel témoignage !!!

Le lecteur découvrira ici plusieurs vérités si bouleversantes qu'on pourrait qualifier cette Solution à sept pour cent de Manuscrits de la mer morte du holmesisme.

Le texte ayant été largement authentifié, tout holmesien conséquent devrait le lire, pour passer derrière l'écran de fumée et découvrir le vrai que dissimulait le mythe.

Brace yourself ! lecteur holmesien, c'est à une révolution copernicienne que tu vas être confronté.
Tu apprendras que certains des récits rapportés par John Watson étaient des faux, écrits dans l'unique but de protéger un secret d'Etat et des vies privées.
Tu sauras pourquoi Holmes est vraiment allé en Autriche, et pourquoi il n'en revint pas.
Tu loueras le grand détective pour avoir repoussé de plusieurs années une guerre atroce.
Tu découvriras qui est vraiment le Professeur Moriarty et quel rôle il joua dans la vie de Sherlock (et accessoirement de Mycroft) Holmes.
Tu assisteras à une rencontre entre deux des plus grands esprits de l'époque, un détective du monde et un détective des âmes.
Tu verras Holmes vaincre son plus grand ennemi.
Tant d’incroyables merveilles !
Si tu es toujours là, et pas encore à lire, ne te prétends plus holmesien !

Documenté, le récit de Meyer rend un bel hommage au corpus holmesien. Notes de bas de pages, références, allusions, ton, rien ne détonne dans cette Solution à sept pour cent. Et néanmoins, plein de rouerie, Meyer prend la peine de prévenir son lecteur, par l'entremise d'un avant-propos écrit par John Watson, qu'il trouvera peut-être des différences de style entre ce témoignage et les écrits habituels du docteur – différences dues aux années écoulées, à l'absence de notes, à une dictée orale.

On appréciera le souci du détail de l'auteur. On aimera aussi, des rues embrumées de Londres aux fastes chatoyants de la Vienne des Habsbourg, suivre à nouveau les traces du plus brillant esprit du siècle, ici singulièrement handicapé. Et quelle joie d'assister à la rencontre improbable entre deux géants du siècle finissant : l'illustre Londonien et le controversé Viennois.

Si l'histoire n'est guère complexe, elle fait la part belle à l'aventure et aux rebondissements, dans un genre qu'on ira jusqu'à qualifier de mélodramatique. Comploteurs, assassins, victimes en grande détresse, Holmes, une fois encore, prend tous les risques pour rendre justice à l'innocence meurtrie tout en s'impliquant dans la marche du monde ; sans oublier de régler avec courage et brio le problème majeur qui empoisonna toute son existence. De la belle ouvrage.

On regrettera juste une haletante poursuite en train qui, si elle est spectaculaire, paraîtra peut-être un peu longue au fanatique d'enquête et de déductions. Et on signalera que le roman a été adapté au cinéma par Herbert Ross en 1976.

La solution à sept pour cent, Nicholas Meyer (lu en VO)

Commentaires

Thomas Day a dit…
Le film est très très bien. La scène-clé où est révélée la véritable identité de Moriarty est excellente. Dommage qu'on ne le trouve pas en DVD ou en bluray à un prix décent, mais j'ai peut-être mal cherché. Par contre on trouve assez facilement La vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder. Excellent aussi. Et drôle (les scènes en Ecosse !).
Gromovar a dit…
Merci, je note les deux références.
Et bonne année à toi.
Baroona a dit…
Ça me donne envie de devenir holmesien, d'être capable de lire un roman en anglais et de passer mes réticences sur les oeuvres référencées/réutilisant des personnages connus. Rien que ça.
*cède à la facilité et s'en retourne lire "Les Quatre de Baker Street"*
Gromovar a dit…
Achète toi quelques-unes des nouvelles et commence à découvrir.