The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

The Expert System's Brother - Adrian Tchaikovsky


Monde et date inconnus. Handry est un jeune garçon qui vit à Aro, une petite communauté rurale. Sa mère est morte, et il a une sœur jumelle, Melory.

Matrilinéaire, presque dépourvue de division sociale du travail, la communauté d'Aro compte 317 habitants au sein desquels se distinguent seulement un Lawgiver, un Architect, un Doctor. Tous vivent dans de petites huttes groupées autour d'un arbre géant et du nid de guêpe qu'il porte ; entre l'arbre, ses guêpes, et les humains qui vivent à ses pieds existe une relation symbiotique évidente.
Economiquement, à Aro, tous doivent faire leur part, rendre à la communauté l'équivalent ce qu'elle leur donne, on appelle ça « porter son poids » ; ici on dirait « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». La communauté prend soin des siens mais la productivité y est trop faible pour qu'elle puisse se permettre d'entretenir des poids morts.

Deux particularités notables : D'abord, les trois porteurs de fonctions sociales spécialisées sont chacun « habités » par un esprit – installé dans le crane ad hoc par la ruche – qui conseille sur le ton de celui qui ordonne et qui est obéi. D'autre part, ressemblance et conscience collective rendent la conformité obligatoire. Toute déviance est punie de bannissement (Severance) après une cérémonie de marquage physique qui pose un stigmate indélébile et rend, de surcroît, le déviant largement incapable de survivre dans la nature sauvage qui va devenir son nouveau quotidien.

Par accident, Handry se retrouve quasi-severed. Après trois ans d'exil intérieur au sein d'une communauté qui ne sait pas quoi faire de lui si ce n'est un bouc émissaire possible et un Intouchable certain, Handry doit fuir quand le nouveau Doctor (sa sœur jumelle) doit terminer la cérémonie, le condamnant à une mort prochaine. En cavale, Handry va voyager de village hostile en village hostile, découvrant le (pas si vaste) monde et la vérité sur la société dans laquelle il vit.

"The Expert System's Brother" est une novella d'Adrian Tchaikovsky.

On y comprend vite que le voyage d'Handry va lui faire découvrir la vérité sur un monde dont il ignorait la vérité et les racines historiques. Ce thème du monde faux-nez a déjà été traité très souvent de La planète des singes à Zardoz, en passant par Les nefs de Pangée ou La cinquième saison, entre nombreux autres. Mais il l'est ici d'une manière qui ne laisse rapidement guère de doute sur ce que seront les révélations finales. Dommage.

On peut aussi faire une lecture religieuse ou marxiste de la novella, au choix (cf. Tchaikovsky Cthulhu).
Sharskin, le colossal banni qui révèle la vérité du monde à Handry a rassemblé une communauté quasi fanatique autour de lui et de son projet de renversement à venir. Il est un leader révolutionnaire charismatique, assoiffé de pouvoir, sûr de la rectitude de son projet, convaincu de la nécessité de couper les branches mortes et d'éliminer par la violence un monde corrompu pour faire advenir un monde juste.
Il peut donc évoquer un prophète ou un inquisiteur, un fanatique sacrifiant l'humain au transcendant, la référence explicite à La marque de Caïn peut le suggérer, la fascination pour les étoiles aussi.
On peut aussi penser au Leur morale et la nôtre de Trotsky. C'est alors de la faillite morale de la révolution violente et des mécanismes de terreur que parlerait le texte de Tchaikovsky, la conclusion semblant choisir, comme dans son excellent Dans la toile du temps, la voie de l'alliance et de l'adaptation, une voie que d'aucuns qualifieraient de réformiste.

On peut y voir enfin – chapitre final encore – l’affirmation forte selon laquelle le « peuple » ne doit pas laisser le pouvoir à la technostructure ni aux experts, ceux-ci devant être confinés dans le rôle de conseillers du prince sans jamais en devenir les souverains.

Quoi qu'il en soit, même si les lectures politiques excitent un peu l'intellect, le texte est à la fois trop prévisible, trop court, et trop linéaire.
Dès les premières pages, on comprend, à quelques détails près, ce qu'il en est du monde – ce qui n'était pas le cas dans les œuvres sus-citées.
La résolution finale est à la fois Deus ex machina, téléphonée, et bien trop simple dans sa manière de surmonter les obstacles, presque vaudevilienne.
Personnages (l'architecte Iblis notamment) et lieux sont largement sous-exploités.
La narration ex-post assure au lecteur dès l'abord qu'Handry vivra et aura compris.
Rien à dire sur le style, pas plus que sur ce texte dont il est légitime de se demander s'il mérite une heure de peine.

The Expert System's Brother, Adrian Tchaikovsky

L'avis d'Apophis
L'avis de Feyd Rautha


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