Yal Ayerdhal in Bifrost 118 - La fin de la guerre éternelle

Dans le Bifrost 118 il y a les rubriques habituelles. Critiques des nouveautés, scientifiction and so on. Il y a aussi un édito d'Olivier Girard qui rend un hommage appuyé et émouvant à Yal Ayerdhal , un grand de la SF française qui nous a quitté il y a dix ans et dont je me souviens de le gentillesse et de la capacité d'attention à tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, appartenait à ce milieu qui était le sien et qui est le nôtre. Dans le Bifrost 118 , il y a   donc un gros dossier sur Yal Ayerdhal (qu'on appelait entre nous simplement Yal) . Un dossier sur l'homme actif et en colère qu'il était, de ses combats pour le droit des auteurs à son militantisme intelligent (il y en a) . Dans le  Bifrost 118  il y a aussi une plaisante nouvelle de Yal Ayerdhal,  Scintillements . Il y raconte comment finit la "guerre éternelle" entre deux civilisations galactiques qui n'auront jamais pu communiquer. Dans un écho déformé de Lem ou d'Haldema...

Le boucher de Chicago - Robert Bloch - Anecdotique


1893, Chicago s’est parée de blanc pour son Exposition Universelle. A l’occasion du 400ème anniversaire de l’arrivée de Christophe Colomb dans le Nouveau Monde, les USA exhibent leur modernité et mettent en scène ce qui deviendra l’American Exceptionalism. S'offrent aux millions de visiteurs pavillons et allées où trouver science, architecture, religions, armement, électricité, mais aussi des attractions plus triviales telles que la danse des voiles de Little Egypt, le tout dans une architecture néoclassique blanche et monumentale.

1893 est aussi l’année où le « docteur » H.H. Holmes inaugura son « château », un bâtiment trompe l’œil dans lequel, non content de pratiquer la médecine et la pharmacie – le tout sans titre – il louait aussi des chambres meublées aux touristes venus visiter l’Exposition – des femmes principalement. Il y tortura, y tua, et y démembra entre 27 personnes (avouées) et 200 personnes (vraisemblables), ce qui fait de lui le premier tueur en série américain avéré.
Finalement arrêté, il vendit sa confession au magnat de la presse Randolph Hearst avant d’être pendu en 1896.

"Le boucher de Chicago" est un thriller de Robert ‘Psychose’ Bloch inspiré de l’histoire vraie de Holmes. On y voit un escroc de haut vol, assassin et illusionniste, magnétique et séduisant, qui promet le mariage à des femmes avant de les occire pour s’approprier leur assurance-vie ou leurs économies. On le voit aussi tuer ses associés ou complices. On le voit maitriser comme personne faux-semblants, trompe l’œil, illusions, portes et passages dissimulés. Le tout dans le labyrinthique château qu’il s’est fait construire en usant de techniques d’escroquerie qui s’apparentent à un système de Ponzi dont il serait le seul bénéficiaire et qui perdurerait grâce à l’élimination physique des « clients ».

On y voit l’Exposition, avec sa technologie, son clinquant, son parfum de scandale, cette schizophrénie américaine naissante parfaitement décrite par Xavier Mauméjean dans La société des faux visages (qui m’a donné envie de lire sur Holmes).

On y suit les aventures « policières » de Crystal, une jeune et intrépide journaliste tentant à grand peine de se faire une place dans un monde d’hommes, et de Jim, son fiancé – qui ne le restera pas, Crystal préférant une liberté conquise de haute lutte au rôle que la société de l’époque réservait aux femmes.

Après une entrée en matière inquiétante où Gregg (le Holmes de Bloch) tient autant de Barbe Bleue que de Landru, arrivent les enquêteurs amateurs Crystal et Jim qui tournent sans relâche autour de Gregg afin de prouver ce qu’ils subodorent voire de le pousser à la faute. Mais rien ne marche. Gregg est trop rusé, et il faudra le courage de Crystal, qui s’infiltre dans l’entourage du tueur au risque de sa vie, pour enfin mettre un terme à la chevauchée meurtrière de Gregg/Holmes.

Fin romancée, événements imaginés, Bloch brode autour de l’histoire vraie. Qu’importe, peu connaissent l’histoire vraie. Et le roman n’est pas inintéressant. Le fonds est historique, l’Exposition est finement décrite, l’ambigüité américaine aussi. Enfin, le personnage de Crystal, en forte tête intrépide et intelligente, est d'un commerce agréable.

Reste que la mise en récit est un peu trop succincte à mon goût. Il faudrait plus de pages pour développer mieux les sentiments des uns et des autres, faire monter plus efficacement suspense et tension, ajouter un peu de complications à une affaire qui semble parfois très mécanique. Quand au style, il est quelconque, simplement utilitaire.
Le roman est court (environ 200 pages petit format), il se lit donc vite et sans déplaisir, mais frustre un peu tant par sa brièveté que par son absence de lustre.

Le boucher de Chicago, Robert Bloch

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