L'Ombre sur Innsmouth - Lovecraft illustré par Baranger

Comme deux fois déjà , je signale la sortie d'une adaptation de Lovecraft par François Baranger. Il s'agit cette fois de The Shadow over Innsmouth , ici traduit littéralement L'Ombre sur Innsmouth au lieu du plus traditionnel Le Cauchemar d'Innsmouth . Comme pour les deux adaptations précédentes, je ne vais pas chroniquer un texte connu et maintes fois résumé, analysé, décortiqué. Je te renvoie donc pour l'histoire, lecteur, à la fiche Wikipedia de la nouvelle, fort bien faite si ce n'est qu'à l'instant où j'écris ces mots la version de Baranger ne s'y trouve pas encore. Tu prendras plaisir, j'en suis sûr, à lire la belle préface de Sandy Petersen, notre maitre à tous, à parcourir les rues de la très décatie Innsmouth dans les pas de Robert Olmstead, à pénétrer dans la délabrée Pension Gilman, à contempler la façade du bâtiment abritant L'Ordre ésotérique de Dagon , à côtoyer des Marsh, trop de Marsh. Le "masque d'Innsmouth...

Bitch Planet 2 - President Bitch - Mouais


TRIGGER WARNING : Je vais faire une critique plutôt négative d'un comic féministe – pas pour son fond mais pour la forme qui l'exprime. Si tu ne peux pas le supporter, passe à la prochaine chronique, elle arrivera assez vite.

Suite de la série Bitch Planet, avec ce tome 2 intitulé "Président Bitch !"

Le contexte, celui d'un totalitarisme masculiniste dirigé par les Pères, est connu et largement décrit ici dans les détails de son abjection. En tome 1, le monde a été présenté, les biographies de certaines des prisonnières ont été dévoilées, une part des manipulations politiques menées en coulisse aussi ; et puis il y a eu le drame de la fin. Entrée donc dans le tome 2 qui prolonge et développe. On y découvre d'autres bios, on y côtoie un résistant solitaire, on y assiste à une révolte de prisonniers et au retour en scène d'un personnage politique porteur d'espoir.

Hélas, après un tome 1 qui promettait beaucoup, je suis un peu déçu par ce tome 2. Pourquoi ?

D'abord, la surprise est retombée. Le monde, maintenant décrit, passe en arrière-plan. C'est aux histoires des protagonistes et du monde de prendre le relais. Moment de transition toujours difficile dans les œuvres dystopiques. Si l'histoire progresse ici, j'ai trouvé le développement à la fois un peu lent dans les grandes lignes (on n'avance guère en dépit de l'apparition trop prévisible d'un personnage clé), trop facile dans la résolution des détails (la prise de la salle de contrôle par exemple), et pas toujours logique (le traitement réservé à Whitney, ou l'inimitié entre femmes et trans par exemple, puis le fait que celle-ci semble disparaître trop vite une fois posée).

D'autre part, le discours semble passer de féministe à anti-masculin, on le remarque dans quelques adresses ou slogans pour le moins monolithiques. Non que je me sente agressé – j'ai le cuir plus dur que ça – mais la non mixité dans l'art n'est décidément pas mon truc. Si tu n'écris que pour ta bande, il faudra te passer de mon attention et de mon argent. J'avais eu le même sentiment à la fin du Malcolm X de Spike Lee par exemple.

Et puis, il y a le trigger warning – parodié au début de cette chronique – qui ouvre le volume (et était donc au début de l'issue #6), dont je ne suis même pas sûr qu'il n'ait pas coloré ma perception de tout ce que j'ai lu ensuite (cette chronique est donc à prendre avec des pincettes). Détestable pratique que je croise pour la première fois dans une œuvre en français. Comment décrire un monde masculiniste et dire qu'on peut ne pas lire un numéro entier de la série qui précisément illustre une manifestation ignoble de cette réalité, sans compter qu'il donne chair et noblesse au personnage de Meiko ? Les auteurs font ce qu'ils veulent – même si sur ce point ils sont loin d'être originaux dans le monde anglo-saxon. Je n'adhère pas. Imagine-t-on 1984 s'ouvrir par un trigger warning ?

Reste un récit dystopique pas déplaisant à lire, même si les rebondissements qu'on y trouve sont assez prévisibles. Un récit dont je lirai sûrement la suite pour en connaître l'évolution, d'autant que la fin et l’apparition des Enfants d'Eleanor Duane (un mouvement de résistance) laisse espérer un rééquilibrage du focus vers le lieu du pouvoir véritable, à savoir la Terre du régime des Pères.

Restent aussi le style graphique et les vignettes d'ambiance qui aident à se plonger dans l'abjection infantilisante du régime et sont toujours d'énormes pépites d'ironie tragique, au moins pour la première intitulée « Bienvenue dans la féminité », les suivantes étant un peu plus brutes de fonderie.

A suivre, sans blanc-seing.

Bitch Planet t2, Président Bitch, DeConnick, De Landro

Commentaires

Lhisbei a dit…
Je prends quand même (enfin, quand je le trouverai...)
Gromovar a dit…
Je serai preneur d'un second avis.
GeishaNellie a dit…
Tiens l'idée était intéressante, mais c'est vrai que ça a l'air lent à la seule façon dont tu en parles. Bien dommage, mais si tu as d'autres comics féministes à me conseiller je suis preneuse 😋
Gromovar a dit…
Sur l'instant, non, mais tu seras la première informée ;)

Si tu veux un roman avec une héroïne larger than life, L'arche de Darwin de J. Morrow.