Yal Ayerdhal in Bifrost 118 - La fin de la guerre éternelle

Dans le Bifrost 118 il y a les rubriques habituelles. Critiques des nouveautés, scientifiction and so on. Il y a aussi un édito d'Olivier Girard qui rend un hommage appuyé et émouvant à Yal Ayerdhal , un grand de la SF française qui nous a quitté il y a dix ans et dont je me souviens de le gentillesse et de la capacité d'attention à tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, appartenait à ce milieu qui était le sien et qui est le nôtre. Dans le Bifrost 118 , il y a   donc un gros dossier sur Yal Ayerdhal (qu'on appelait entre nous simplement Yal) . Un dossier sur l'homme actif et en colère qu'il était, de ses combats pour le droit des auteurs à son militantisme intelligent (il y en a) . Dans le  Bifrost 118  il y a aussi une plaisante nouvelle de Yal Ayerdhal,  Scintillements . Il y raconte comment finit la "guerre éternelle" entre deux civilisations galactiques qui n'auront jamais pu communiquer. Dans un écho déformé de Lem ou d'Haldema...

Une pluie sans fin - Michael Farris Smith - Retour de Bifrost 80


Impossible de commencer cette chronique sans dire aux lecteurs potentiels un mot de la 4ème de couv’. Mad Max 2 ? Je ne comprends pas cette référence (ou je ne la comprends que trop, hélas). La Route ? Pourquoi pas. Mais l’écriture n’a rien à voir, à fortiori pour moi qui ai détesté le laconisme de McCarthy. Reste Faulkner et sa southern-lit. Là oui. Sûrement.

Futur proche. USA, précisément la Gulf Coast. Le changement climatique a fait de tout le sud des USA une zone de passage d’ouragans de plus en plus violents et rapprochés. Lassé de perdre un combat sans fin contre les eaux, le gouvernement fédéral a décidé d’évacuer les Etats du Sud, largement inondés, puis de tracer une Limite en dessous de laquelle il n’exerce plus aucune autorité. Des millions sont partis vers une vie de réfugiés dans le nord du pays, les plus chanceux y ont de la famille. Restent quelque illuminés, losers, aventuriers, menant une vie difficile et souvent courte en fouillant dans les ruines pour tenter de survivre. Cohen, seul contre toute raison dans la maison qui aurait du abriter une vie heureuse avec sa défunte femme et leur fille à naitre, est de ceux-là. Bloqué en pleine névrose. Une rencontre douloureuse avec une « communauté » organisée autour d’un fou violent qui se prend pour Noé va l’obliger à sortir de sa torpeur. Il conduira alors, en Moïse post-apocalyptique et fortuit, un petit groupe de survivants vers la Terre Promise d’au-delà de la Limite. Un Exode pénible et dangereux au cours duquel il retrouvera une part de son humanité.

La littérature post-apo a le vent en poupe aujourd’hui. Au vu du réchauffement à venir, difficile de ne pas le comprendre. Dans ce qui est devenu un genre à part entière où le meilleur côtoie souvent le pire, Une pluie sans fin apparaît comme une très bonne surprise. Farris Smith décrit fort bien les lentes pérégrinations de Cohen et des siens, odyssée qui s’apparente à un chemin de croix moderne dans ce monde inondé et ruiné qui était, il n’y a pas si longtemps, le nôtre. Il construit finement des personnages dont le passé et les épreuves fondent la richesse, en équilibre instable entre ce qui fut (perdu pour l’essentiel), ce qui est, et ce qui sera peut-être. Il le fait en usant d’une écriture riche et complexe, qui suggère avant de décrire, saute sans transition d’un scène dialogique à l’autre, et utilise souvent des techniques proches du « courant de conscience ».

Une pluie sans fin est un roman dur, riche, très écrit, souvent hypnotique, éminemment recommandable.

 Une pluie sans fin, Michael Farris Smith

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