The Butcher of the Forest - Premee Mohamed

Il y a des années de ça, quelqu'un disait dans une interview : « Les Blancs nous emmerdent avec leurs problèmes » . C'était Jean-Paul Goude ou Jean-Baptiste Mondino – je ne sais plus lequel – et il parlait, si mes souvenirs sont bons, des clips de Talking Heads ou de Laurie Anderson. Tu vois, lecteur, que je source avec grande qualité cette brève chronique. Que celle de ces deux personnes qui s'est vraiment exprimé sache que, dorénavant, c’est à peu près tout le monde qui nous emmerde avec ses problèmes. Démarrer ainsi la chronique de The Butcher of the Forest , novella fantastique de Premee Mohamed, te permet de subodorer, sagace lecteur, que je ne l'ai pas vraiment appréciée. Détaillons un peu plus. Temps et lieu indéterminé. Espace-temps des contes. Veris est une femme d'une quarantaine d'années qui vit dans un petit village, au cœur d'une région conquise par un tyran (oui, c'est son seul nom dans le texte) après une guerre et des massacres innommabl...

Jumping the shark



"The curious case of the clockwork man" est un roman de Mark Hodder qui peut se lire seul mais qui est idéalement la suite de The strange affair of Spring Heeled Jack.
Comme le précédent, "The curious case of the clockwork man" est un roman steampunk qui se déroule dans une Angleterre uchronique née de l’assassinat de la reine Victoria. La mécanique et la génétique sont bien plus avancées que dans notre monde à la même époque ; la société, elle, n’est guère plus progressiste.
Hodder est un auteur intelligent et créatif, "The curious case of the clockwork man" a donc toutes les qualités de son prédécesseur. Il décrit de manière efficace, bien que moins développée, la misère sociale de l’époque. Il parvient à faire sentir l’air du temps, fait de foi dans le progrès scientifique (le Titanic n’a pas encore coulé et Ypres pas encore montré ce qu’on pouvait faire de la science), d’inégalités criantes considérées comme presque normales, d’explorations géographiques à l’autre bout d’un monde encore à découvrir, de mysticisme. Il sait aussi mêler habilement faits historiques et fictionnels, récupérer des personnages réels utilisés hors de leur cadre, dans un jeu de référence qui consiste à leur faire utiliser hors contexte des phrases qu’ils ont vraiment prononcées. Il reprend même l'idée de Westerfeld d’une guerre entre Angleterre et Empire Centraux en inversant les avantages technologiques (ici l’Angleterre a les mécaniciens et l’Allemagne les généticiens).
Le lecteur trouvera donc dans "The curious case of the clockwork man", Richard Burton toujours en quête des sources du Nil, le poète Swinburne qui lui sert de Watson, un Oscar Wilde enfant, ressemblant étrangement à un irrégulier de Baker Street, qui cite innocemment de l’Oscar Wilde adulte, Galton dans sa nouvelle forme, Babbage, le philosophe Spencer au destin étonnant, Madame Blavatski, Raspoutine, etc… Il se trouvera aussi au cœur de deux affaires politiques et judiciaires de l’époque, mises à la sauce uchronique, l’affaire Trent et l’héritage Tichborne. Il découvrira comment la famine irlandaise a été aggravée par les expériences d’apprentis sorciers des généticiens qui espéraient la vaincre. Il assistera à l’activation d’une lutte des classes que les marxistes de l’époque appelaient de leur vœux et qui ne devint jamais très violente en Angleterre. Il bénéficiera enfin de quelques réflexions intéressantes sur les occasions perdues, les chemins qu’on aurait du prendre et qu’on n’a pas pris, et les conséquences psychologiques de ces erreurs d’aiguillage (ou de ces absences d’aiguillage pour ceux qui n’ont jamais eu de choix).
Hodder offre de plus au lecteur quelques eye candies sympathiques tels que les insectes géants servant de véhicules ou le robot Nelson (la palme revenant incontestablement à la Folk’s Wagon creusée dans une carapace de coccinelle).
Mais "The curious case of the clockwork man" est un roman que j’ai trouvé bien inférieur à "Spring Heeled Jack".
D’abord, les personnages sont sous-utilisés. Burton est loin, dans cet épisode, de l’explorateur intrépide et brutal qu’il était dans la réalité et qui transparaissait dans le premier opus. Hodder ne fait pas grand chose de Spencer, on attend vainement que celui-ci joue un rôle capital dans sa peau (et pas dans celle…, mais je n’en dis pas plus), et je ne parle pas ici de Babbage qui occupe la fonction de premier mort. Même Galton fait des apparitions décevantes et mièvres. Je ne dirais pas ici ce que je pense de l’utilisation que l’auteur fait de Nietzsche, décrit en futur dictateur d’Allemagne, Hodder tombant pour le coup dans l’imbécillité la plus crasse concernant les interprétations de l’œuvre du sage au marteau.
J’écrivais dans ma précédente chronique que l’auteur poussait loin et brillamment les limites de la suspension d’incrédulité. Je pense qu’ici il les a dépassées, comme Fonzie sautant par dessus le requin. Entre l’espèce de Frankenstein obèse morbide portant sur son visage, pour se déguiser, la peau arrachée de sa victime (et sous son coude un bout de son avant-bras), les émeutes ouvrières qui se changent rapidement en invasion de zombies avec dégustation de chair humaine, le cactus génétiquement modifié servant de pistolet, le double braquage simultanée du diamantaire, l’énergie éthérique en quantité illimitée qu’utilisent les « fantômes » comme des armes laser, le robot mécanique épéiste, et j’en passe, Hodder en fait trop, et ce qui pourrait passer, sur deux planches, dans un comics, prend un fort goût de ridicule quand c’est longuement décrit sur d’interminables pages. Car en plus, sur le plan du rythme, certains passages qui se veulent humoristiques ne le sont guère et ne font que ralentir les évènements (le passage dans le bordel par exemple), évènements dont la progression scénaristique est régulièrement entravée par de trop nombreuses et bien trop longues scènes de bagarre, émeute, transport, etc…. Hodder se délecte à décrire son monde, ça se voit, mais il en oublie parfois son histoire. Son roman est un roman d’action comme il est des films d’action, et la finesse d’enquête et de réflexion du premier me paraît perdue dans une débauche de mouvement et d’effets spéciaux. L’équilibre entre action et réflexion, dont j’avais déjà trouvé qu’Hodder le perdait à la fin de son premier volume, est ici irrémédiablement compromis à mon avis. Son roman à la Bruce Willis m’a ennuyé, sauf aux rares moments où les protagonistes se posaient et réfléchissaient un peu.
The curious case of the clockwork man, Mark Hodder

Lu dans le cadre du Winter Time Travel 2.

Commentaires

Guillmot a dit…
Bon, on zappe alors.
Efelle a dit…
J'ai l'impression après la BCF on va avoir le BCS.

Bon tout ça me fait penser qu'il ne faut pas que j'oublie le défi.
Le pendu a dit…
Personnellement, dès que je vois un 19ème siècle alternatif avec des célébrités, je fuis. Je ne crois pas avoir jamais rien vu/lu de bon dans ce registre.
Gromovar a dit…
Le premier était plutôt sympa.

Je n'en ai pas beaucoup lu d'autres, donc je te fais confiance sur ce point. En tout cas, sur le steampunk, je suis un peu refroidi globalement. Je comptais lire Half-Made World, mais ça va descendre dans ma liste.