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L'écorcheur", premier roman traduit en français de Neal Asher, a été pour moi une bien heureuse surprise. Etre obligé de le lire sur Kindle, puis iPhone, puis Netbook aurait pu mal me disposer à l'endroit de ce roman. Ca n'a heureusement pas été le cas. Quoique...
J'ai copieusement detesté le début et j'étais à deux doigts d'abandonner quand mon intérêt s'est reveillé. Il faut dire que je n'aime pas les histoires de marin, et le début du roman contient plus de mer, de voiliers, de navigation, et de pêche au gros que je ne peux en supporter. Puis l'action s'est précipitée et m'a littéralement saisi pour ne plus me lacher.
Le contexte. Un univers qui rappelle la Culture, avec des mondes membres et d'autres aux marches. Une planète, Spatterjay, où tout ce qui vit est immortel ou presque, effet secondaire de l'action d'un parasite viral, et très agressif (une chaine alimentaire sert de fil rouge au livre). Une culture lo-tech qui évoque les pirates, avec capitaines flamboyants, danger omniprésent, et alcool fort.
L'écosystème. Une galerie de créatures marines, toutes carnivores et féroces. Des vers géants, porteurs du virus. Des "voiles", créatures volantes guère futées vivant en commensal avec les marins humains. Des immortels, des IA, des drones, des "morts", des homards intelligents et esclavagistes, une tête coupée, Neal Asher crée une galerie des horreurs peuplée de monstres. Et puis surtout de l'eau, beaucoup d'eau. Une mer dans laquelle il ne faut pas tomber sous peine d'être rapidement dévoré.
Le propos. Trois personnages étonnants, une femme sans doute immortelle, un cadavre réanimé, et le représentant humain d'une race de frelons dotée d'une intelligence communautaire, débarquent sur Spatterjay, chacun investi d'une quête, mystérieuse au début du roman. Vengeance, recherche de sens, politique, les buts des uns et des autres se heurtent et s'entremêlent, et leurs actes provoquent la réaction violente d'un membre peu recommendable d'une race elle-même bien peu recommendable et ne rechignant pas au cataclysme. Violence, vengeance, folie, rédemption, dans "
L'écorcheur" les motivations hurlent pour s'exprimer.
Le style. Très agréable en anglais ; je ne connais pas la traduction. Neal Asher sait mener une histoire à un rythme effréné (mis à part au début, mais je ne présume pas que tout le monde partage mon allergie à Moby Dick) ; le récit progresse rapidement vers des fins qui apparaissaient de plus en plus clairement au fil des pages frénétiquement tournées. La dureté extrême de certaines scènes est contrebalancée par un humour parfaitement dosée dans certaines autres. Asher est ironique sans jamais être rigolard (les drones de combat, têtes brulées et enthousiasme communicatif en sont un parfait exemple ; on pense aux robots du Ilium de Dan Simmons), cruellement descriptif quand c'est nécessaire, et il ne s'interdit aucune outrance dans un roman qui finit par virer au feu d'artifice.
Doté de personnages typés et attachants, violent, drôle, gore, excitant, "
L'écorcheur" est un
roller-coaster qui vous emportera et ne vous lachera plus jusqu'à la fin. J'espère vivement que Neal Asher aura le bon goût de revisiter la planète Spatterjay. Je l'y accompagnerai.
L'écorcheur, Neal Asher
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