Daryl Gregory : I’m Not Disappointed Just Mad AKA The Heaviest Couch in the Known Universe

Conseil aux nouveaux auteurs : Faites attention quand vous plaisantez en ligne. Imaginez, vous faites une blague sur l’écriture d’une histoire ridicule, quelque chose que vous n'écririez jamais ; ce n'est qu'une bonne blague jusqu’à ce qu’un éditeur en entende parler et vous demande d’écrire cette histoire. Il y a quelques années, sur un site, je disais à quel point Iain Banks était mon écrivain préféré mais que si je devais écrire un space opera, ce serait sur deux fumeurs défoncés qui manquent la guerre interstellaire parce qu’ils essaient de déplacer un canapé d’un bout à l’autre de la ville. Jonathan Strahan est alors intervenu et a dit : Je publierais ça. Ha ha ! Très drôle. Il a alors ajouté : Non, vraiment. Plus tard, on s’est croisés à une convention, et il m’a dit : Alors, cette histoire façon Iain Banks ? Et voilà, c'est fait ! Je sais, c’est une histoire absurde, mais en ces temps sombres... Sachez juste qu’elle a été écrite avec beaucoup d’amour et d’admir

14-18 Le champ d'honneur : Qu'on en finisse !

Troisième tome de la série 14-18 de Corbeyran et Le Roux.

Avec "Le champ d’honneur", on entre dans la phase d’enlisement. Après une trêve de Noël que des moments fugaces de fraternisation entre damnés du front ont rendu mémorable, les affaires militaires, hélas, reprennent. La Guerre de mouvement - celle qui devait ramener les soldats dans leurs foyers avant Noël – a pris fin sans vainqueur évident, il est maintenant clair que la guerre sera longue.

Sur un territoire français en partie envahi, les troupes belligérantes s’apprêtent à s’enterrer pour des années. Le conflit approche de ce qu’on nommera la Guerre d’usure, monstruosité cynique dont le seul objectif était de vaincre en provoquant plus de pertes chez l’ennemi qu’on n’en subissait soi-même. Le nombre absolu des morts n’était plus déterminant pour les états-majors, seul importait le différentiel entre ses propres pertes et celles de l’ennemi.

Pour les huit amis engagés dans le conflit, le début de l’année 1915 est le moment où, tout enthousiasme ou sens du devoir bus, apparaissent lassitude, frustration, énervement. Six mois qu’on n’est pas rentrés, famille et vie civile manquent cruellement, d’autant que les premiers permissionnaires partent et engendrent des suspicions, infondées, de favoritisme. Entre les huit appelés dont Corbeyran nous raconte l’histoire, les tensions montent, fruits de l’éloignement, de la peur, et de l’ennui, résultats aussi des secrets, anciens ou actuels, que met à jour la promiscuité de la vie de campement.

C’est alors qu’une mission très dangereuse est confiée à la compagnie. Armand, ami et ici surtout caporal des sept autres, découvrira à cette occasion les affres du commandement, mais aussi la folie furieuse qui saisit le corps quand le poids des responsabilités et celui de la peur sont si lourds qu’on saute, sans même le vouloir, sur le moindre exutoire, si contestable soit-il, tant est grand le besoin d’évacuer la tension pour ne pas défaillir.

Aussi convaincant que les deux précédents, cet album plonge le lecteur, au ras du sol, dans les réalités de la guerre. Il y voit la barbarie des combats, les craquements qui altèrent peu à peu le vernis de civilisation, le cynisme insensible d’une hiérarchie militaire qui considère ses hommes comme des pions sur un échiquier et parle de sacrifice comme on dit gambit. Mêlant très habilement une phase combattante, superbement mise en scène, et les petits moments de la vie au campement, mais liant aussi passé et présent ou front et arrière, Corbeyran offre encore un récit qui touche et informe. La mise en image est très belle, classique mais fine, et magnifiquement colorisée.

14-18 t3, Le champ d’honneur, Corbeyran, Le Roux

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